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schéma mixons nos énergies

Septembre 2022 

Baisse du niveau de vie !

L’avis de l’UNSA SPAEN : la baisse du niveau de vie des salariés CEA est générale

Le pouvoir d’achat n’est pas une vue de l’esprit : il se traduit concrètement dans notre quotidien, au niveau du logement, de notre nourriture, de l’accès à la santé sans restriction ou à l’éducation ainsi que dans nos loisirs ou pour les opportunités qui s’offrent à nous. Le pouvoir d’achat n’est pas une lubie de l’esprit mais bien la certitude de vivre dignement de son travail.

Il ne faut pas imaginer que tous les salariés CEA ont de bons revenus : en 2021, 5 000 de nos collègues (tous statuts confondus) ont touché la « prime pouvoir d’achat » (prime PEPA), qu’ils ne retrouveront pas en 2022 faute d’autorisation par le gouvernement de verser cette prime. L’organisme est pourtant éligible mais notre « argentier » a dû estimer qu’en 2022, cela n’avait pas de sens … au regard de l’inflation.

 

nuage de mots salaires

Nous pouvons aligner les opérations en nous appuyant sur les statistiques officielles : c’est facile (quelques additions/soustractions), c’est rapide et cela donne des « points de repère ». Néanmoins, cela ne reflète que partiellement l’ampleur du recul de notre niveau de vie.

La baisse du pouvoir d’achat : une réalité minimisée par les indicateurs en usage

Pour démontrer que nous sommes des « enfants gâtés », la direction se retranche depuis longtemps derrière une comparaison simple : celle de notre évolution salariale à l’inflation, qui démontrerait la progression générale de notre pouvoir d’achat.

Or, cette comparaison (et la conclusion qui en est tirée) repose largement sur la valeur de l’inflation qui, au-delà du fait qu’elle a été (heureusement) exceptionnellement faible durant 10 ans, constitue un indicateur tout à fait imparfait. Cet indicateur offre un reflet partiel et « moyenné » de la réalité, même s’il est usuel et constitue des points de comparaison (d’un pays à l’autre, d’une période à l’autre). Il est à noter que le chiffre du taux d’inflation fait polémique car il ne repose pas sur les mêmes critères lorsqu’il est calculé par l’INSEE en France en utilisant l’indice des prix à la consommation (IPC) ou par Eurostat de la commission européenne qui utilise l’indice des prix à la consommation harmonisé (IPCH) pour la France. Par exemple en 2021 le taux d’inflation est de 1.6% selon l’INSEE (chiffre utilisé par le CEA) comparé à 3.4% selon Eurostat.

L’inflation : un indicateur qui moyenne les situations et qui atteint vite ses limites

Nous ne sommes pas les seuls à souligner les limites de la notion d’inflation : un rapport très intéressant a été publié par l’IREF, Institut de Recherches Economiques et Fiscales, think tank revendiquant pourtant son libéralisme et que nul de pourra soupçonner de connivence avec les organisations syndicales.

https://frirefeurope.b-cdn.net/wp-content/uploads/sites/2/2022/06/Politiques-publiques-et-inflation.pdf

Pour l’IREF, mais également pour France Stratégie, de nombreuses « dépenses pré-engagées » ou « dépenses contraintes » n’apparaissent pas dans le calcul officiel de l’inflation et contribuent fortement au grand malaise actuel :

  • Logement: loyer ou crédit, assurance, électricité, eau, chauffage. L’impact des dépenses de logement peut être ravageur dans certaines régions et pour certaines catégories, particulièrement les jeunes générations qui n’ont pas pu s’installer avant la flambée des prix. Le calcul de l’inflation prend en compte les dépenses de logement de manière excessivement limité, alors qu’elles représentent parfois jusqu’à 40% du revenu.
  • Transport: crédit, assurance, carburant,
  • Téléphonie et communication,
  • Santé et famille,
  • Services

Ces dépenses, ne peuvent pas être supprimées, réduites ou renégociées, et elles ont augmenté beaucoup plus que l’inflation depuis 2000, entre 2 et 5 fois plus.

Ainsi, le calcul du pouvoir d’achat et de son évolution repose sur l’Indice des Prix à la Consommation et l’inflation. Les calculs effectués à partir de ces données concluent que ce pouvoir d’achat a progressé de 8 % durant le dernier quinquennat, avec un gain plus marqué pour les revenus les plus modestes ; il y a cependant un vrai décrochage entre les évolutions du pouvoir d’achat réel d’une part et du pouvoir d’achat calculé de l’autre, du fait de ces dépenses contraintes.

Pourquoi parlons nous de cela ? Parce que la supposée progression de notre pouvoir d’achat dans la période 2010-2021 repose essentiellement sur l’absence d’inflation, c’est-à-dire sur un indicateur dont nous souhaitons mettre en évidence les très grandes limites.

Et au CEA ? 13 % ? 33 % ? 60 % ? 82 % ? avalanche de chiffres pour une grande incompréhension

  • 33 %, c’est l’augmentation moyenne de nos salaires selon la direction, qu’elle compare à (cf ci-dessous) …
  • 13% : c’est l’inflation calculée par les indices officiels entre 2010 et 2021, donc avant l’accélération récente (2021) de l’inflation.
  • 60 %, 80 % : ce sont les montants de certaines hausses de tarifs ou de taxes (certaines peuvent avoir été multipliées par 8) qui ne sont pas comptabilisées dans l’inflation ! à retrouver dans le rapport d’analyse de l’IREF.

Parlons de choses concrètes

L’UNSA SPAEN est prêt à comparer ce qui est comparable mais surtout, veut parler de choses concrètes :

  • Difficile pour la direction d’expliquer à des salariés qui travaillent à 100 % sur des contrats industriels, au rythme des industriels et à qui on demande désormais de trouver des clients « dans le tissu industriel » local qu’ils doivent comparer leurs rémunérations à celles du CNRS.
  • Difficile de comparer nos salaires au regard des autres entités industrielles en omettant certains éléments variables comme l’intéressement ou la participation pouvant atteindre plusieurs mois de salaire en cumulé dans le privé.
  • Difficile d’expliquer aux salariés en poste depuis des années qu’il n’y a pas d’argent pour revaloriser leurs rémunérations alors qu’on en trouve pour relever les salaires d’embauche.
  • Difficile d’expliquer que la (faible) progression moyenne de notre pouvoir d’achat, même dans sa version calculée à partir des indices officiels (20% en 12 ans entre 2010 et 2021), constituerait un véritable « déroulement de carrière » dont il faut se réjouir.
  • Encore plus difficile d’expliquer qu’il s’agissait d’un temps « d’abondance et d’insouciance » désormais révolu et qu’il nous faut désormais nous résoudre à subir le recul de notre niveau de vie qui s’annonçait déjà l’an dernier.

« le langage des chiffres a ceci de commun avec le langage des fleurs, on lui fait dire ce que l’on veut »*

Il faut, comme souvent, remettre l’église au centre du village car la présentation de valeurs moyennes n’a jamais été un bon critère pour évaluer les réalités salariales (qui sont très diverses en fonction de l’âge, de la situation, etc…).

Une étude réalisée par nos collègues de Cadarache sur le personnel présent sur le site depuis 2010, a ainsi montré que la « dispersion » des augmentations de salaires (écart entre les rythmes d’augmentation des salariés) est très conséquente : leurs valeurs vont de 7,81 % pour le salarié le moins augmenté et 65,58 % pour le salarié le plus augmenté.

  • Ces écarts battent totalement en brèche l’idée que notre système d’augmentation serait « rigide et automatique ». Ils illustrent, au contraire, que les salariés peuvent être, en fonction de l’évaluation hiérarchique, fortement accélérés ou fortement ralentis : les managers peuvent jouer sur les « valeur minimale », « valeur maximale », « répétitifs », etc….
  • Un autre élément mis en évidence par l’étude est que les salariés Annexe 2 qui ne bénéficient plus de l’augmentation de la prime d’ancienneté ont tous connu une augmentation de salaire inférieure à 30 % durant ces 12 années.

D’un point de vu général, il est clair que –quel que soit leur statut- les salariés qui sont dans leur dernière décennie de vie active ont une évolution de rémunération très ralentie, ce qui est particulièrement difficile à supporter dans un contexte de retour de l’inflation

Conclusion : les chiffres parlent, mais ne crient jamais*

… C’est pourquoi ils n’empêchent pas nos tutelles de dormir.

Soyons sérieux : la réalité vécue va au-delà d’indicateurs qui sont, par nature, imparfaits et partiels en plus d’être tordus dans tous les sens.

Au-delà de ce simple constat, la multiplicité des trajectoires et des situations fait que nous affrontons plus ou moins bien la dégradation actuelle de notre situation.

En tout état de cause, résumer le recul du niveau de vie subi par les salariés du CEA à une « moindre augmentation » relève, au mieux, de la cécité volontaire.

Même dissimulés par une inflation exceptionnellement faible, les « cadrages » qui nous été imposés durant la période écoulée (2010-2021) se sont traduits concrètement par la fin des évolutions de carrière, par l’érosion des fins de vie professionnelles et, pour beaucoup d’entre nous, par une stagnation ou une baisse du niveau de vie.

* M. Audiard