De l’importance de respecter le protocole d’accord préélectoral et l’agenda des élections professionnelles des comités sociaux et économiques…

JURISPRUDENCE ÉLECTORALE C.S.E.

A propos de Cass. soc. 10 juillet 2024
https://www.legifrance.gouv.fr/juri…

° FAITS :

Une société a conclu, en octobre 2022, un protocole d’accord préélectoral avec trois organisations syndicales, en vue des élections au C.S.E. devant se tenir en novembre. Par une lettre recommandée, avec avis de réception, entre les deux tours, une salariée s’est portée candidate pour le second tour des élections, sans être élue.

La société a saisi le tribunal judiciaire pour l’annulation de la candidature de la salariée, soutenant qu’elle a été déposée tardivement. Elle était donc irrégulière voire présentait un caractère frauduleux. Le tribunal judiciaire a rejeté la requête en annulation de l’entreprise par un jugement du 9 mars 2023.

° Le Juge du tribunal judiciaire, juge des élections professionnelles…

Le tribunal a considéré notamment que le retard est trop bref pour perturber l’élection. En outre, la candidature n’était pas contestable sur le fond. Le courrier de contestation de l’employeur était lui-même tardif, expédié après que le matériel de vote par correspondance ait été envoyé aux électeurs.

° La Cour de cassation

La société a donc saisi la Cour de cassation car elle considère que les modalités prévues au protocole d’accord préélectoral s’imposent à tout le monde, et que celui-ci prévoit une heure limite de candidatures « pour le second tour de scrutin au mardi 22 novembre 2022 à 12 heures ».

La candidature ayant été déposée à 12 h 09, elle devait être déclarée irrégulière. Ensuite, le protocole prévoit que la candidature doit préciser « le collège » concerné, ce que la salariée n’a pas fait.

Enfin, la société argumente selon le fait que si l’employeur n’a pas à se faire juge de la régularité des candidatures, il est légitime de les contester en justice.

Difficulté ?

La question qui se posait avant tout (mais, bien sûr pas la seule au regard des autres points d’irrégularités de la procédure électorale…) était de savoir si une candidature parvenue neuf minutes après l’heure limite de dépôt doit être considérée comme trop tardive ?

La Cour de cassation y répond dans cet arrêt du 10 juillet 2024.

Elle rappelle, d’abord, que les modalités d’organisation du scrutin, fixées par un protocole d’accord préélectoral conclu à la condition de double majorité et dont la régularité n’est pas contestée, s’imposent à « tous ».

Dès lors que cela est rappelé, la Cour précise que le protocole d’accord préélectoral ayant fixé une échéance, même dépassée que de 9 minutes, cela suffisait à invalider la candidature, qu’elle ait été écartée ou non par l’employeur. Le jugement du tribunal doit être cassé.

En conclusion…

Il résulte donc de cet arrêt que de manière assez claire et rigoureuse, « l’heure, c’est l’heure ! » et, il est exact que 12 heures, ce n’est pas 12 h 09, dès lors que le délai pour la candidature est fixé de manière impérative par le protocole d’accord préélectoral.

Tout retard rend, aussi infime soit-il, la candidature irrégulière. Si l’employeur n’a pas écarté lui-même une candidature non conforme aux règles prévues par le PAP, il conserve effectivement la possibilité de la contester devant le juge judiciaire.

La Cour a pourtant déjà fait preuve, en 2020, de plus de mansuétude (Cass. Soc. 27 mai 2020, n° 18-60.038 : un syndicat avait déposé la liste à 17 h 02, deux minutes après la limite fixée et pour la Cour, le tribunal aurait dû tenir compte que le retard était dû à une demande de l’employeur et vérifier si celle-ci n’était pas abusive).

Mieux vaut donc respecter les horaires, plutôt que de prendre le risque de préjuger de l’absence d’effets réels d’un retard, sur l’élection et ses résultats, motif de rejet des contestations de l’UNSA souvent invoqué par les tribunaux judiciaires !

Louis BERVICK, Juriste, Secteur Juridique National UNSA.

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