Durant le COVID, la bise avait quasiment disparu au travail. Depuis la sortie de la pandémie, pas de retour en arrière et la pratique de la « bise » demeure réinterrogée. Même le Droit s’en empare. Mais, qu’en est-il vraiment ?

BISE OU NOT BISE ?

JURISPRUDENCE :
A propos de cour d’appel de Caen, 13 mai 2016, n° 15/01805

* DEVOIR DE SALUER AU TRAVAIL

Dans l’esprit des juges et de la jurisprudence, sur le lieu de travail, le salarié devrait suivre les règles de politesse et respecter les autres travailleurs et ce, même si son contrat de travail ne le mentionne pas.
Ces pratiques constituent un socle du vivre-ensemble et de la qualité de vie au travail.

Saluer une autre personne fait partie de ces règles de politesse. Il serait alors indispensable que le travailleur salue son employeur ainsi que les autres salariés.
Par ailleurs, l’accomplissement des règles de politesse serait majeur, afin de préserver l’image de l’entreprise.

* UNE SANCTION POUR REFUS DE SALUER ?

Les comportements impolis sont donc à bannir de l’entreprise et peuvent faire l’objet de sanctions.
Ainsi, refuser de saluer une autre personne a pu constituer dans la jurisprudence une faute.

Pour rappel, lorsqu’il souhaite sanctionner un comportement qu’il estime inapproprié, l’employeur choisit une sanction proportionnée, en prenant en compte le contexte du refus de saluer. En effet, un simple oubli de saluer ne saurait être sanctionné de la même manière qu’un refus délibéré. Le refus de saluer un supérieur hiérarchique peut quant à lui être plus sévèrement sanctionné, car il peut être assimilé à une marque d’adversité et de désobéissance.

Dans les pratiques visées, l’employeur sanctionne généralement le salarié, qui a refusé de saluer, par un avertissement. En effet, une sanction plus grave, telle qu’un licenciement, ne saurait nécessairement être justifiée par un « refus de saluer ».
En revanche, le refus de saluer, qualifié « fautif », a pu déjà être pris en compte dans une procédure disciplinaire voire de licenciement, qui comprend d’autres faits fautifs.
Les juges peuvent être amenés à rechercher l’existence d’un motif « suffisamment grave et légitime » dans le refus de saluer d’un salarié.

* PAS OBLIGÉ DE FAIRE LA BISE…

L’exigence repose sur le « salut ». Dès lors, le salarié peut choisir la forme de celui-ci, tant qu’il reste respectueux et adapté à l’entreprise.

Dans les enquêtes dont il est fait état, de nombreux salariés, notamment des femmes, estiment que le rituel de la bise les pèse et les gêne.

Un salarié peut en général tout à fait refuser de faire la bise. Le « salarié, qui préfère serrer la main plutôt que de faire la bise, ne commet pas de faute » (CA Caen, 13 mai 2016, n° 15/01805).

Est recherchée, dans l’appréciation d’une bonne ou mauvaise conduite, la discrimination des personnes (article L. 1132-1 et suivants du code du travail).
Ni l’employeur, ni un autre travailleur ne peut contraindre un salarié à lui faire la bise.

Sur ce, à chacun de saluer de la manière la plus opportune au travail en respectant l’autre !

Jade EL MARBOUH, juriste en droit social, Pôle Service Juridique, Secteur Juridique National UNSA

juridique@unsa.org

Crédits photo : vectorjuice, Freepik