Selon l’article L. 6521-6 du code des transports, le code du travail est applicable au personnel navigant de l’aéronautique civile et à leurs employeurs, sous réserve des dispositions particulières fixées par le titre II du livre V de la sixième partie de ce code. Les dispositions de l’article L. 1226-1 du code du travail, relatives au maintien du salaire pendant un arrêt de travail pour maladie, ayant le même objet que celles prévues à l’article L. 6526-1 du code des transports, ne sont pas applicables au personnel navigant de l’aéronautique qui relève à ce titre des dispositions particulières du code du transport…
Maintien de salaire et conflit de normes, dans le transport aérien…
JURISPRUDENCE SOCIALE DE LA COUR DE CASSATION
A propos de l’arrêt de la Cour de cassation du 29 janvier 2025 n° 23-21.790
https://www.courdecassation.fr/deci…, (Ci-joint)
° DÉCISION DU JUGE :
« Les articles L. 6526-1 du code des transports et L. 1226-1 du code du travail ayant le même objet, soit le maintien du salaire pendant un arrêt de travail pour maladie, la cour d’appel a exactement décidé que l’article L. 1226-1 du code du travail n’était pas applicable à la situation du salarié et que les dispositions particulières du code des transports devaient s’appliquer ».
° FAITS
Un homme a été engagé comme officier pilote de ligne par la société Transavia en 2007, le métier étant soumis à l’accord collectif d’entreprise du personnel navigant technique dite « ACE PNT ».
Il a été placé en arrêt maladie à plusieurs reprises en 2018, mais n’était pas satisfait de ses conditions de rémunération durant ces arrêts de travail. Pour cette raison, il a saisi le Conseil de prud’hommes en 2019.
° PROCÉDURE
Le Conseil de prud’hommes de Villeneuve-Saint-Georges a rejeté sa demande. Il a donc saisi la Cour d’appel de Paris. Pour appuyer sa demande, il considère que : le « Code du travail prévoit un maintien de salaire plus favorable que le Code des transports, que sa compagnie aérienne applique ».
La Cour d’appel de Paris tranche, le 4 octobre 2023, en précisant que la règle du Code des transports est incompatible avec celle du Code du travail, et la première doit donc s’appliquer. Elle ajoute que le demandeur ne démontre pas en quoi l’accord ACE PNT viole le principe de faveur (selon lequel un accord collectif ne peut être moins favorable qu’une disposition légale) comme le prétend le salarié.
La Cour d’appel a donc rejeté ses demandes, ce qui l’a conduit à former un pourvoi en cassation. Il soutient que le Code des transports n’exclut pas l’application des dispositions d’ordre public du Code du travail. Également, que la convention ou l’accord peut comporter des stipulations plus favorables aux salariés que les dispositions légales en vigueur, et qu’ils ne peuvent déroger aux dispositions d’ordre public.
La question qui se pose avant tout dans ce cas est celle de la hiérarchie des normes, particulièrement entre le Code du travail, le Code des transports, et un accord collectif.
° ECLAIRAGES
La Cour de cassation rappelle que le code du travail est de manière générale applicable au personnel navigant de l’aéronautique civile et à leurs employeurs, sous réserve de dispositions particulières qu’il fixe (relatives à la Guadeloupe, la Guyane, la Martinique, Mayotte, La Réunion, Saint-Barthélemy, Saint-Martin et Saint-Pierre-et-Miquelon).
Elle rappelle également les règles du maintien de salaire prévues par les deux codes, pour en conclure que les deux ayant le même objet, le Code des transports prévoyant expressément les règles des « membres du personnel navigant professionnel de l’aéronautique civile », doit s’appliquer.
° FONDEMENTS JURIDIQUES
Pour rendre cet arrêt, la Cour de cassation s’est donc basée sur : l’article L.1226-1 du code du travail qui prévoit notamment que : « Tout salarié ayant une année d’ancienneté dans l’entreprise bénéficie, en cas d’absence au travail justifiée par l’incapacité résultant de maladie ou d’accident constaté par certificat médical et contre-visite s’il y a lieu, d’une indemnité complémentaire à l’allocation journalière prévue à l’article L. 321-1 du code de la sécurité sociale ».
Mais aussi, l’article L.6526-1 du code des transports selon lequel : « En cas d’incapacité de travail, résultant de blessures ou de maladies non imputables au service, d’un membre du personnel navigant professionnel de l’aéronautique civile en cours d’exécution du contrat, l’employeur lui assure jusqu’à la reprise de ses fonctions de navigant, ou jusqu’à la décision de la commission mentionnée à l’article L. 6511-4, ou, le cas échéant, jusqu’à la date de l’entrée en jouissance de la retraite : 1° Son salaire mensuel garanti pendant le mois au cours duquel est survenue l’incapacité et pendant les trois mois suivants ; 2° La moitié de ce salaire pendant les trois mois suivant cette première période ».
° DROIT EN ACTIONS
Cet arrêt rappelle que les sources de droit peuvent être diverses et parfois empiéter les unes sur les autres, avec des spécificités propres à chaque domaine.
Les règles « spéciales » professionnelles ont vocation à s’appliquer si elles ont le même objet ».
Dans le cas présent, il est question de maintien de salaire pendant un arrêt maladie, dans le domaine du secteur aérien, destiné à compenser la rémunération du salarié, jusqu’à ce que de nouveau, celui-ci puisse prendre son envol…
Louis BERVICK, juriste en droit social, Service Juridique, Secteur Juridique National UNSA.
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